Dans la nuit du 25 au 26 novembre, Vincent tombait d'un troisième étage en jouant au parachute avec un peignoir de bain. Il a bu un litre de téquila, fumé une herbe congolaise, sniffé de la cocaïne. Le retrouvant inanimé, ses camarades appellent les pompiers. Vincent se redressa brusquement, marcha jusqu'à sa voiture, démarra. Les pompiers le coursent, s'engouffrent dans son immeuble, montent avec lui dans l'ascenseur, pénètrent dans sa chambre, Vincent les injurie. Il dit « Laissez-moi me reposer », eux : « Andouille, tu risques de ne jamais te réveiller. » Dans la chambre d'à côté, ses parents continuent de dormir. Vincent a foutu les pompiers dehors. Il s'est endormi comme un charme. À neuf heures moins le quart, sa mère le secoue pour l'envoyer au travail, il ne peut plus bouger d'un pouce, elle le transporte à l'hôpital. Le 27 novembre, prévenu par Pierre, je rendis visite à Vincent à Notre-Dame-du-Perpétuel-Secours. Deux jours plus tard il mourait des suites d'un éclatement de la rate. Ce livre est paru en 1989.



Hervé Guibert a été l'un des écrivains des années Sida, puisque la maladie l'a personnellement touchée; il en est mort en 1991. Son oeuvre tourne principalement autour de cette maladie; ses écrits sont donc principalement autobiographiques .

Fou de Vincent a une place importante dans son oeuvre globale. Il raconte l'histoire d'amour d'Hervé avec un jeune homme encore mineur autodestructeur et accro aux drogues. Evidemment, cette autobiographie ne fait qu'ouvrir à une suite, puisque qu'elle initie le lecteur aux prémisses de la maladie d'Hervé et ouvre la voie à son travail littéraire; on se doute que Vincent en est atteint, l'on apprendra plus tard qu'il est fort probable qu'Hervé l'ait contracté à ce moment-là, sans que cela soit dit explicitement. Le livre s'ouvre sur l'annonce du suicide de Vincent.  L'annonce du décès du jeune homme réveille les souvenirs d'Hervé sur son histoire avec le jeune garçon.